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Les pôles : une étrange affaire de canards en migrations

  

Au XIX siècle (et même bien avant), de nombreux explorateurs de la région polaire nord, étaient persuadés qu'autour du pôle, existait, non pas une immense banquise froide et glacée, mais plutôt, une mer libre de glace, dont on peut voir la configuration sur cette carte qui serait dit-on due, à Gérard Mercator 1595

Mais l'explorateur qui nous en a dit, bien plus que les autres, sur cette affaire de mer libre est le Dr I.I. HAYES, dont l'Éditeur Hachette , en 1868, a publié l'ouvrage, "La mer libre du Pôle." Voyage de découvertes dans les mers arctiques exécuté en 1860-61 Paris, In-8 , 517 pages. Traduit de l'anglais par Ferdinand de Lanoy. Ouvrage illustré de 70 gravures sur bois et de 3 cartes.
 et directement en PDF à :

 Pour les puristes qui, on le sait, aiment remonter aux sources, transcrivons ici quelques éléments de l'édition restreinte de 1877, que nous possédons, et où l'on trouve alors :

Pages 188 à 189 :
     "Tout le démontrait : j'avais atteint les rivages du bassin polaire. L'océan dormait à mes pieds.... il m'était donc impossible d'aller plus loin. La crevasse dont j'ai parlé eût déjà suffit pour nous empêcher d'atteindre le nord de la baie; mais, au large, les glaces paraissaient encore en pire état. Plusieurs flaques d'eau s'ouvraient près du littoral, et sur l'une d'elles venait de s'abattre une bandes de "dovekies" ou de guillemots à miroir blanc. En remontant le canal kenedy, j'avais reconnu nombre de leurs stations d'été; cependant j'étais assez surpris de voir les oiseaux eux-mêmes à une époque si peu avancée de la saison. Les mouettes bourgmestres volaient au dessus de nous, se dirigeant vers le nord où elles cherchaient les eaux libres pour leur nourriture et leur demeure... "

 

Page 190 :

 

Où après avoir hissé des drapeaux, Hayes déchira une feuille de son carnet de notes pour y inscrire les lignes suivantes :
 
" Ce point, le plus septentrional qu'on ait encore pu atteindre, a été visité les 18 et 19 Mai 1861 par le soussigné, accompagné de George F . Knorr, après un voyage en traîneau tiré par des chiens. De notre hivernage près du cap Alexandre , à l'entré du détroit de Smith, nous sommes arrivés ici par une marche de quarante six jours. Je crois, d'après mes observations, que nous sommes à 81 degrés 35 minutes de latitude septentrionale et à 70 degrés 30 à minutes de longitude occidentale. La glace pourrie et les crevasses nous empêchent d'aller plus loin. Le canal kennedy parait s'ouvrir dans le bassin polaire. Aussi persuadé qu'il est navigable en Juillet, Août et Septembre au moins, je retourne à ma station d'hiver pour essayer de pousser mon navire au travers des glaces après la débâcle de cet été. " signé J.J. HAYES

 

19 Mai 1861

     " Cette note placée dans une petite fiole apportée tout exprès, fut soigneusement déposée sous le cairn, puis nous poursuivîmes notre route en nous tournant vers le sud; mais je quittais avec répugnance ce lieu qui exerçait sur moiune fascination puissante, et c'est avec des sensations inaccoutumées que je me voyais seul avec mon jeune camarade, dans ces déserts polaires que nul homme civilisé n'avait foulé avant nous. Notre proximité de l'axe du globe, la certitude que de nos pieds, nous touchions une terre placée bien au delà des limites des découvertes précédentes, les pensées qui me traversaient l'esprit en contemplant cette vaste mer ouverte devant nous, l'idée que peut-être ces eaux ceintes de glaces baignent des rivages d'îles lointaines où vivent des êtres humains d'une race inconnue: telles sont les considérations qui semblaient donner je ne sais quoi de mystérieux à l'air que nous respirions... "

 

Fin de citation

 

Tout ce qui est raconté ci-dessus est superbement rassemblé dans une gravure montrant ce fantastique paysage qui à juste titre a suscité beaucoup d'émotion chezHayes et son compagnon. Voici cette gravure :


Et en couleur, c'est encore mieux grâce à  Christian C....... qui réalise d'amirables aquarelles (Aquarelle et voyage).



En analysant attentivement cette gravure dans ses détails les plus fins, on découvre effectivement au second plan une vraie mer libre et surtout des flopées d'oiseaux dont la présence en ces contrées ultra froides, pose problème n'est-ce pas ?


Nous ne pouvons pas évidemment nous étendre ici, faute de place, sur les surprenantes révélations de cet ouvrage, mais pour terminer cette introduction de notre article, découvrons à la page 195, du livre de Hayes ceci, qui est une reprise d'une déclaration de l'Américain Kane :


" Il est impossible, en rappelant les faits relatifs à cette découverte,- La neige fondue sur les rochers, les troupes d'oiseaux marins, la végétation augmentant de plus en plus, l'élévation du thermomètre dans l'eau, de ne pas être frappé de la probabilité d'un climat plus doux vers le pôle. Mais signaler les modifications de température au voisinage de la mer libre, ce n'est pas résoudre la question, qui reste sans réponse : Quelle est la cause de la Mer libre ? "


Que dire de plus, si ce n'est que l'on découvre, ici, encore une fois, l'incompréhension des observateurs de l'époque , devant ce phénomène hors normes de la mer libre du pôle.


Mais venons en à la raison principale de cet article:


 où l'on découvre quelques éléments du document en question


Voici donc ce que l'on peut y trouver :


LES MIGRATIONS DES CANARDS
et inductions à en tirer sur la mer libre du pôle Nord
Par M. Gabrel ROGERON.
Les migrations des Canards vers le sud sont de deux sortes. Les migrations régulières à époque fixe, à la fin de l'automne, et les migrations irrégulières à époques indéterminées, dans le courant de l'Hiver.


Les premières, les migrations régulières à époque fixe, ont lieu vers la fin d'octobre, ne variant que de peu de jours chaque année et ne tenant aucun compte de la température douce ou froide, mais seulement, d'ordinaire, de la direction du vent. Ces premières migrations semblent être absolument de long cours, par longues traites et s'étendre de l'extrême nord au centre du continent africain. Les canards qui en font partie passent rapidement et s'arrêtent peu. Aussi font-ils souvent le désespoir des chasseurs qui connaissent bien ces sortes de canards et qui ne peuvent le plus souvent parvenir à les faire descendre, malgré toutes les séductions de leurs appelants.



Quelquefois, blottis dans leur hutte, ils entendent à cette époque les sifflements des ailes de ces nombreux voyageurs une nuit entière sans pouvoir tirer un seul coup de fusil ; bien que ces malheureux oiseaux s'arrêtent trop encore, comme l'attestent les multitudes de leurs cadavres que leurs bandes sèment sur leur route, lesquels viennent grossir nos marchés sur leur long itinéraire. Et il m'est arrivé de revenir d'un voyage d'Italie à cette époque ; d'un bout à l'autre de la péninsule, depuis Naples jusqu'à Gênes, les étalages des marchands de gibier regorgeaient de ces oiseaux.



Les Canards sauvages proprement dits, les cols verts {Anas Bosclias) faisant partie de ces passages réguliers, sont aussi d'une race plus pure, plus fine ; le coloris de leur plumage est également d'un plus vif éclat, preuve qu'ils viennent de régions inhabitées où leur espèce n'a pu être en contact avec notre race domestique.



Ces migrations régulières, que rien n'explique puisqu'elles semblent se produire sans motif apparent, alors que ni le froid ni le manque de nourriture à cette époque ne sont en cause, pour lesquelles on ne peut pas même alléguer, comme chez certains oiseaux de passage, l'instinct migrateur de la race, car une partie d'entre eux n'émigre pas alors des contrées du nord comme on va voir tout à l'heure, ces migrations régulières d'automne, dis-je, ne seraient-elles pas causées par les nuits des contrées polaires que ces oiseaux habiteraient ?

On présume, en effet, que sous l'influence des courants d'eau chaude sous-marins, du golf-stream, il existe une mer libre au pôle baignant des pays tempérés, des continents et des lieux couverts de végétation. De hardis voyageurs, l'Américain Kane et ses compagnons en 1834, ont même prétendu l'avoir découverte. Après avoir traversé d'immenses déserts de glace, ils auraient trouvé cette mer libre peuplée d'une innombrable multitude d'oiseaux d'eau, Mouettes, Canards, Oies sauvages, etc.



Mais, néanmoins, quand même les rigueurs du froid ne se feraient jamais sentir dans ces régions polaires, (qu'on y jouirait toujours de la plus agréable température, les longues nuits qui les enveloppent pour plusieurs mois, sont à elles seules un obstacle insurmontable au séjour continuel de ces oiseaux. Il leur faudrait, à un moment donné, fuir ces ténèbres menaçant de les envahir, et émigrer du côté du jour et du sud, comme ils le feraient sous l'impulsion du froid. Aussi, ces grandes migrations régulières des canards ont-elles lieu vers la fin d'octobre et le commencement de Mars pour le retour, époque coïncidant précisément avec celle où commence et finit la nuit polaire.


Les autres migrations de canards sont, au contraire, irrégulières, parce qu'elles coïncident avec les froids dont elles sont la conséquence. Quand les bulletins météorologiques annoncent une forte baisse de température dans le nord de l'Europe, on peut s'attendre à voir apparaître ces dernières, et d'autant plus nombreuses que la zone de froid est plus étendue et surtout que celui-ci est plus intense. Car tous ne partent pas ensemble ; beaucoup ne déménagent qu'à la dernière extrémité, et quand les cours d'eau qui se glacent ordinairement plus tard que les étangs et marais, sont également pris.


De plus, ceux-là ne demandent pas mieux que d'émigrer le moins loin possible, de s'arrêter chez nous et d'y séjourner, s'ils le peuvent, ne semblant s'avancer qu'à regret vers le midi et seulement à mesure que ces contrées deviennent inhabitables à cause du froid, ou, ce qui est plus exact, au fur et à mesure de la congélation des eaux, car toute cette race peut supporter les plus basses températures sans inconvénient.



De même, par contre, dès que le dégel est arrivé, et qu'un vent plus tiède vient à souffler du sud, sans prendre garde à l'époque où on se trouve, la plupart d'entre eux ont hâte de regagner les régions du nord, quitte à revenir un peu plus tard nous rendre visite encore le même hiver si des froids nouveaux les y contraignent. Aussi, leurs allées et venues du nord au sud, nous semblent-elles un présage de froid ou de chaleur. Comme, en effet, la zone de froid gagne d'habitude de proche en proche, et qu'ils ont tout intérêt à la devancer de la puissance de leurs ailes, on aperçoit d'ordinaire leurs avant-gardes avant que le froid ne soit devenu rigoureux. Quant au temps doux, c'est à tort qu'on se figure cette fois qu'ils l'annoncent. Ils le constatent seulement, puisqu'ils ne remontent vers le nord que lorsque le dégel est déjà arrivé dans le pays qu'ils traversent.


Les Canards de cette seconde catégorie de voyageurs, de ces migrations d'hiver, sont d'ordinaire beaucoup moins distingués de formes, plus épais, de couleurs plus ternes, et même un certain nombre sont plus ou moins chamarrés de blanc et d'une multitude de nuances appartenant à nos canards domestiques, mais étrangères à la livrée du véritable type ; preuve évidente de rapprochements, de mésalliances avec les races domestiques, preuve également que leur patrie est voisine des lieux habités par l'homme.

Et chose remarquable, ce sont ces canards sauvages, si étrangement chamarrés (il en est même de tout blancs), connus de nos chasseurs d'Anjou sous le nom de Canes D'étangs, qui forment toujours l'arrière-garde de ces migrations d'hiver, car il faut des froids excessifs du nord pour que nous les voyions apparaître chez nous. Il est donc à supposer qu'avec le sang domestique qui, sans doute, coule plus ou moins dans les veines de ces derniers, joint à leur corps plus pesant, à leurs ailes moins robustes, il leur en coûte davantage pour prendre le parti de s'expatrier et qu'ils ne peuvent se résoudre à cette dernière extrémité qu'après que tous leurs congénères ont déjà quitté le pays.


Le départ par les grands froids de ces Canards émigrant des contrées septentrionales pour gagner les nôtres, et ensuite celles du midi, s'il y a lieu, semble avoir la plus grande analogie avec celui de nos Canards de Maine-et-Loire, qui n'abandonnent, eux aussi, leurs étangs que lorsqu'ils sont glacés, pour gagner évidemment de même le sud. Les uns comme les autres sont atteints fréquemment d'albinisme, semblent à peu près sédentaires, en principe du moins, dans le pays qu'ils habitent, ne le quittant que sous l'impulsion du froid, avec cette différence seulement que, dans le nord, ils sont plus souvent forcés de se résoudre à cette extrémité, puisque les grands froids y sont plus rigoureux de même que plus fréquents. Et ainsi de suite les migrations doivent être de moins en moins fréquentes en avançant vers les contrées méridionales oii, enlin, l'hiver finissant par ne plus jamais faire sentir ses rigueurs, les canards qui les habitent semblent ne plus devoir émigrer.


On peut donc induire de la différence de ces deux sortes de migrations , que la première, celle d'automne , périodique régulière (lin d'octobre) est formée de Canards venant directement de la mer libre. Sinon, pourquoi, parmi tous ces Canards venant également du nord, les uns arrivent-ils à époque fixe, avec une régularité parfaite, indépendante de la température, tandis que les migrations des autres sont l'irrégularité même et toujours soumises à l'impulsion d'un motif connu, le froid? Pourquoi cette apparente différence de mœurs et d'habitude chez des oiseaux de même espèce et semblant venir des mêmes régions ?



Une seule explication est donc, en effet, possible, c'est la mer libre (et cette mer n'aurait pas été découverte qu'il faudrait la supposer), c'est que les Canards de la migration d'octobre viennent de fuir la longue nuit de six mois, qui précisément à cette époque vient de voiler leur pays pour jusqu'au retour du printemps. Quelle autre cause plausible aurait pu forcer à émigrer à époque fixe cette race si volontiers sédentaire, alors que le froid n'existe pas encore, et que leurs congénères n'émigreront que plus tard, peut-être même pas du tout, et seulement sous l'impulsion des froids les plus vifs ?


D'ailleurs, si Kane (Photo ICI ) a réellement vu cette multitude de Canards et autres oiseaux aquatiques dont il fait mention, il ne peut en être autrement pour ces oiseaux ; car il ne leur reste aucun choix ; il leur faut émigrer sous peine d'être enveloppés dans ces ténèbres. Et à quelles contrées iront-ils alors demander l'hospitalité, ces oiseaux habitués à une lumière sans fin, à cette longue journée d'une demi-année et à un soleil si chaud qu'il est capable, dit-on, de fondre le goudron ?


Ce ne peut être aux plus rapprochées, plus ou moins glacées, privées presque de soleil pendant l'hiver, et par là même, si différentes de leur pays l'été. Ce ne serait d'ailleurs qu'une installation désagréable et précaire, puisqu'il faudrait émigrer, de nouveau d'un instant à l'autre aux premiers froids plus rigoureux.



N'est-il donc pas supposable, au contraire, qu'obligés de quitter leur pays pour une période longue et fixe, ils choisissent une contrée d'où ils ne risquent pas d'être dérangés par le froid, presque aussitôt arrivés, ils retrouvent, sinon une journée de six mois, au moins de longs jours, le soleil, et un climat, malgré sa situation si différente, devant présenter une certaine analogie avec leur précédent, l'été.


Mais pour rencontrer ce pays sans hiver, il faudra entreprendre un long voyage, s'installer sans doute, jusque dans l'Afrique centrale, ce qui, d'ailleurs, n'est pas fait pour les effrayer avec la puissance de leurs ailes, leurs savantes combinaisons de route fen ligne, en angle, où chaque membre de la troupe vient se reléguer pour fendre l'air) et le soin qu'ils ont de profiter du vent pour les aider dans leur marche vers le sud.


Tandis que les autres Canards du nord, mais dont la patrie est en deçà de la région des nuits d'hiver perpétuelles, et qui par là même n'ont d'autre cause de migration que des froids momentanés, s'écartent le moins possible, et seulement vers la limite des fortes gelées afin de pouvoir rentrer chez eux dès la période de froid passée ; temps toujours relativement court et pouvant prendre fin à chaque instant. De plus, habitués à habiter les pays froids ou tempérés, ils ne ressentent pas le besoin d'émigrer dans des pays différents des leurs.


Ainsi plusieurs raisons semblent donc confirmer la théorie, que la première migration, celle d'octobre, nous vient des régions entrevues, mais encore inconnues et inexplorées, du pôle. Ces raisons sont : l'instinct assez volontiers sédentaire des Canards qui ne les porte pas à se déplacer aussi loin sans motif; le lieu même où il est présumable qu'ils séjournent l'hiver; leur façon d'émigrer si différente de celle des autres Canards du nord qui ne le font que sous l'impulsion de la température la plus rigoureuse, tandis qu'eux nous arrivent avant que les froids sérieux aient envahi les régions du nord; les multitudes de Canards vus sur la mer libre qui doivent évidemment émigrer quelque part, quand celle-ci est couverte de ténèbres ; l'époque où ils arrivent qui est précisément celle où la nuit polaire commence ; enfin la pureté du plumage des cols-verts de cette première migration, semblant évidemment prouver qu'ils viennent de contrées où l'homme n'habite pas, puisque partout ailleurs, les mélanges avec les Faces domestiques influent plus ou moins sur leur coloration.


Fin de citation.


Abzu


Source :
http://lesavoirperdudesanciens.blogspot.fr/2015/08/les-poles-une-etrange-affaire-de.html
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