Une « soucoupe volante » s’est-elle abîmée près d’Aztec au Nouveau-Mexique en 1948, huit mois après Roswell ? C’est la thèse que défendent deux enquêteurs américains, qui ont épluché le dossier pendant plus de deux décennies… Un dossier troublant !

La scène se passe le 25 mars 1948, au Nouveau-Mexique, non loin de la zone des Four Corners (quatre coins), qui sépare quatre États du Sud-Ouest américain : Nouveau-Mexique, Arizona, Utah, Colorado. Un peu plus à l’est se trouve la ville d’Aztec ; la région est assez désertique et le décor se compose des fameuses mesas, le nom espagnol qui désigne les plateaux rocheux d’altitude où quelques arbres ont réussi à s’enraciner au fil du temps.

Peu avant l’aube, le policier Manuel Sandoval roule sur l’autoroute après sa nuit de service passée à surveiller le pipeline de la Southern Union Gas. Soudain, il voit passer au-dessus de lui un objet en forme de disque, de grande taille, qui semble en difficulté et louvoie vers le nord-ouest, en direction d’Aztec et de la zone des Four Corners. Juste après, l’éleveur de chèvres Valentin Archuleta, qui s’affaire à ses tâches matinales, entend un grand bruit et lève la tête pour voir vraisemblablement le même objet, très bas, apparemment hors de contrôle, qui se dirige vers une mesa de l’autre côté de la route. L’objet érafle le bord de la mesa en provoquant une gerbe d’étincelles et poursuit sa route vers le nord. Ancien militaire, Archuleta n’hésite pas une seconde : il se rend à la supérette proche de son ranch, où se trouve un téléphone et finit par joindre la base aérienne de Kirtland à Albuquerque. Son interlocuteur montre un grand intérêt et demande où se dirigeait l’engin : « Vers Hart Canyon. », répond le fermier.

Un disque de trente mètres de diamètre

Un troisième témoin direct est Doug Noland, un ouvrier de 19 ans qui travaille pour une compagnie pétrolière. La région compte, en effet, plusieurs zones d’exploitation. Alors qu’il passe prendre son collègue Bill Ferguson, celui-ci lui dit qu’un feu a été annoncé près d’une zone de réservoirs de pétrole et qu’ils doivent s’y rendre immédiatement. En arrivant, d’autres ouvriers se trouvent déjà sur place. Ils leur expliquent que le feu de broussailles semble confiné au sommet de la mesas et que quelque chose s’est passé là-haut. Les deux comparses montent la colline et tombent sur le vaisseau, un disque d’une trentaine de mètres de diamètre ! Il est légèrement couché sur le côté, en raison d’une protubérance sur la partie inférieure, et doté d’une espèce de capsule à son sommet.

« Le vaisseau était lisse, sans joints, rivets, boulons ni marques de soudure. », explique Doug Noland. « Il était comme en aluminium brossé, semblait très lisse, mais ce n’était pas de l’aluminium hautement poli comme un avion. »

En s’approchant, les ouvriers découvrent que cette surface brillante est transparente quand on regarde de très près, comme les lunettes qui deviendront populaires quelques années plus tard. Alors que le soleil se lève à peine, les témoins distinguent deux petits corps inanimés à l’intérieur de l’habitacle« penchés au-dessus d’une espèce de tableau de bord ». Alors qu’un autre couple de ranchers arrive sur place, les personnes présentes entendent un hélicoptère qui survole la zone. Le policier Manuel Sandoval arrive au même moment. Quand Doug l’interroge sur l’attitude à tenir, Sandoval lui dit des choses très significatives. Il explique qu’il a suivi la route de l’objet après l’avoir vu passer au-dessus de lui, et que des résidents de la ville de Cuba ont signalé plusieurs observations d’ovnis dans les semaines précédentes. Lui-même et l’un de ses collègues, Andy Andrews, ont été témoins de plusieurs observations.

Les « leçons » de Roswell

Il faut préciser que tout ceci se passe huit mois après le crash supposé d’un autre objet à Roswell, à quelques centaines de kilomètres au sud-est, le 7 juillet 1947. L’affaire a fait grand bruit, puisque la presse avait parlé d’un crash d’ovni, avant que l’Air Force ne se rattrape aux branches en affirmant qu’il s’agissait finalement d’un ballon météo. Ainsi, avant de juger ridicule le fait qu’un second objet ait pu s’abîmer si peu de temps après le cas de Roswell, il faut envisager le contexte d’une région à l’époque surveillée de près par d’éventuels visiteurs.

Les témoins présents vont être débriefés et soumis à un serment du secret

Cela expliquerait les nombreuses observations réalisées durant cette période, d’autant plus que ce secteur abritait la zone d’essais des nouveaux appareils et équipements de l’Air Force. Pour le physicien nucléaire Stanton Friedman, connu pour avoir remis en lumière le dossier Roswell dans les années 1980, « Il est incontestable qu’un engin extra-terrestre fut récupéré par des agents du gouvernement à proximité d’Aztec, en mars 1948, et qu’il fut transporté en vue d’un examen classifié. »

En effet, à partir du moment où l’hélicoptère a été vu sur site, tout va aller très vite, comme si les militaires avaient justement tiré les leçons de « l’incident » Roswell et, cette fois, mis en œuvre une procédure extrêmement rigoureuse. Une fois sur place, ils vont trouver le moyen d’ouvrir l’habitacle en actionnant une commande à l’aide d’une perche introduite par un hublot brisé. Ils en extraient seize corps qui semblent brûlés, dont la plupart se trouvent sur un pont inférieur du vaisseau. Les témoins présents vont être débriefés et soumis à un serment du secret. L’objet, qui est très léger, va ensuite être démantelé et transporté en plusieurs pièces vraisemblablement jusqu’à la base de Los Alamos, située à 250 kilomètres.

L’enquête ultra-fouillée des Ramsey

L’affaire va cependant rapidement fuiter, par l’intermédiaire d’un des scientifiques impliqués dans le travail d’étude de l’objet, en vue d’en comprendre la technologie, un processus appelé rétro-ingénierie. Ce scientifique approche en 1949 un journaliste et auteur respecté d’Hollywood, Frank Scully (dont le nom a inspiré à Chris Carter le personnage féminin de la série The X-Files). Il faut ici donner la parole à l’un de ceux par qui l’histoire refait aujourd’hui surface. En effet, après avoir repris l’enquête menée à l’époque par Frank Scully, les ufologues Scott Ramsey et son épouse Suzanne ont publié récemment un ouvrage de synthèse sur l’affaire. Scott Ramsey explique que ce scientifique « voulait que Scully révèle l’histoire et lui a fait croire que le gouvernement allait le faire officiellement, ce qui était bien sûr faux. Je pense que les scientifiques impliqués voulaient s’assurer, au sortir de la guerre, que la technologie récupérée ne puisse servir qu’à des fins pacifiques. Le livre de Scully est sorti en septembre 1950 et a immédiatement été un succès de librairie ; il a vendu plus de 64 000 exemplaires en plusieurs langues. Ce que nous avons fait, c’est reprendre la recherche de Scully en la joignant à la nôtre et en l’épluchant comme un oignon. Scully a notamment révélé des aspects du Manhattan Project développé par l’OSRD et qui étaient top secret à l’époque. Il parle d’un groupe de huit ou neuf scientifiques désignés sous la seule appellation de « Dr Gee », qui avaient travaillé au sein de l’OSRD sur le projet Manhattan. Nous avons pu avoir accès à certains documents déclassifiés qui confirment ce qui figure dans le livre de Scully. Il était impossible que Scully ait eu accès à ces documents à l’époque, même s’il était connu. »

Le pasteur fond en larmes

La suite de l’affaire consiste en une entreprise de décrédibilisation du travail de Scully par les autorités, en s’appuyant sur un autre journaliste, J.P. Cahn, qui s’est estimé spolié parce qu’il voulait acheter l’histoire pour son journal, le San Francisco Chronicle. Ainsi, tout va être fait pour que l’ensemble du dossier passe pour un canular.

Dernière photo connue de J.P. Cahn peu de temps avant sa mort. ©Atlantes Editions

Cependant, les Ramsey ont retrouvé plusieurs témoins directs et indirects qui lui donnent une véritable consistance, même si, compte tenu du caractère extraordinaire de l’enquête, le doute ne pourra être entièrement levé. Parmi les témoins, outre ceux déjà évoqués, on peut citer le cas du pasteur Solon Brown, qui s’est rendu sur le site du crash/atterrissage parce qu’il a remarqué l’agitation inhabituelle ce matin-là, alors qu’il rentrait à sa paroisse principale dans le Colorado, après une nuit passée à Aztec. Il a proposé son aide et un policier lui a confirmé que « des prières » ne seraient pas inutiles, car il y avait des corps… Après avoir fait son office, il était tellement choqué qu’il n’a pu s’empêcher de contacter un proche, diacre de sa paroisse, et lui a raconté ce qu’il avait vu en dépit de son serment du secret. Le fils du pasteur et celui du diacre, qui étaient présents, ont été retrouvés par les époux Ramsey et ont confirmé le récit du pasteur. Celui-ci avait notamment éclaté en sanglots et confié au diacre : « J’essaie de relever cette paroisse. Pourquoi inventerais-je une telle histoire ? Je vous jure que je dis la vérité. »

Les autres témoignages complètent le scénario possible de l’événement et évoquent les modalités de transport de l’objet démantelé, le « nettoyage » du site, ou encore la constitution de « fiches » de désinformation pour tous les témoins directs (c’est-à-dire la création d’un agenda alternatif prouvant qu’ils n’étaient pas là). Même si les faits relatés dans l’enquête des époux Ramsey, aidés par Frank Thayer, sont extraordinaires et semblent, à ce titre, incroyables, le caractère extrêmement minutieux de leur travail ne laisse pas d’interroger. D’ailleurs, ils ne prétendent pas avoir épuisé le dossier et affirment que leur recherche se poursuit. Toutefois, conclut Scott Ramsey : « J’espère que le lecteur comprend que les auteurs savent avec certitude que l’incident d’Aztec est un événement réel, et que la récupération qui a eu lieu à Hart Canyon aurait dû, depuis longtemps, être portée à la connaissance du public américain. ». Et pas seulement lui, bien sûr.

Une enquête fouillée, implacable

Pourquoi l’affaire Aztec refait-elle surface aujourd’hui ? Parce que deux enquêteurs tenaces, le couple Scott et Suzanne Ramsey, ont consacré plus de deux décennies à rassembler les pièces du puzzle et ont récemment publié un livre, aidés de Frank Thayer, ancien professeur d’université. Traduit en français à l’excellente initiative des éditions Atlantes, « Aztec 1948 : un crash d’ovni au Nouveau-Mexique » est le fruit de cette enquête minutieuse, qui fait dire à de bons connaisseurs de l’ufologie comme Thibaut Canuti que « Scott et Suzanne Ramsey sont des ufologues comme il ne s’en fait plus guère et qui ont finalement tout de parfaits enquêteurs criminels. ». Et de saluer « un travail fouillé, implacable et pour le moins troublant des époux Ramsey. »


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1 Commentaire
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Stéphane Stillgard
Stéphane Stillgard
Juil 25, 2018 11:33 am

C’est marrant comme les OVNI semblent évoluer depuis la deuxième guerre mondiale, d’abords les soucoupe volantes comme ici. Puis les engins triangulaires…. Pas certains que ces engins viennent de l’autre bout de la Galaxie 😉